Michael El Baki - Sup/Spé M 1990/1992

Fondateur et directeur technique de la startup Altwy

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Mon parcours à Camille Vernet

Et bien en fait, il était totalement inattendu, mais je ne le regrette absolument pas. Je ne savais même pas qu’il y avait une prépa à Valence la veille d’en prendre le chemin! Sans rentrer dans les détails, à mon époque Parcoursup n’existait pas (ni internet d’ailleurs) et c’était encore le système de choix 1, 2, 3 avec sa “guerre des clochers”. Si on osait mettre en 1 un lycée mieux réputé mais en dehors de son département et qu’on n’y était pas retenu, certains lycées en 2 dans son département en prenaient ombrage et ne regardaient même pas le dossier… Quel que soit le niveau de l’élève.

C’est donc quelques jours après la rentrée que je reçois un coup de fil du proviseur de Camille Vernet me disant qu’il reste une place en Sup (1ère année de prépa) et me demande si je veux la prendre. Comme quoi, parfois, le hasard fait bien les choses…

S’ensuit donc une année en Sup où je m’aperçois que j’aime vraiment bien les maths, mais je commence à prendre mes distances avec la physique, car en fait ça ne m’intéresse pas trop, et je marche plutôt à la motivation (ce qui me vaut quelques souvenirs mémorables avec M. Vidrequin, que je salue d’ailleurs au passage).

Heureusement pour moi, au moment de passer en Spé (2ème année de prépa), s’ouvre une section M, ex-section MP (il n’y avait qu’une section P, ex-section PC, jusqu’alors) et je prends le train en marche, bien content que tout ça se “goupille” encore une fois plutôt bien. Et c’est reparti pour un an, mais dans l’ensemble, je vivais plutôt bien ces deux années de prépa qu’on nous avait toujours présentées comme une expérience terrifiante.

Mon parcours post-CPGE

L’année de Spé m’ayant convaincu que je n’avais pas fait d’erreur et que je préférais vraiment les maths à la physique, il est temps maintenant de trouver une école axée sur les maths, et si possible sans physique, parce que ça va être compliqué d’avoir une école qui a de la physique au concours! Ça devient vite compliqué de rester à un niveau moyen quand on “lâche” une matière en prépa, il faut le savoir. Donc soit on s’accroche, soit on est prêt à jouer avec le feu car on réduit forcément, et drastiquement, son périmètre d’écoles intégrables. C’est là que le caractère de chacun va jouer.

Je me concentre donc sur l’Ecole Nationale de la Statistique et de l'Administration (ENSAE), me retrouve sur liste d’attente, et après quelques jours de 5/2, suis finalement accepté et fais mes valises pour Paris. Des maths, de l’analyse de données, de l’informatique, de l’économie (et beaucoup, vraiment beaucoup de babyfoot), je suis super content et tout va pour le mieux.

A noter que depuis, certaines écoles de commerce, et non des moindres, ont ouvert leur concours aux élèves de CPGE scientifiques, avec au concours seulement des maths, du français et de l’anglais.

Mon parcours professionnel

Après un stage de fin d’étude dans l’équipe R&D d’une salle de marchés, j’ai compris que je veux faire du développement de logiciels (je programme depuis “tout petit”). Je me dis que tant qu’à faire, autant lier l’utile (la formation ENSAE) à l’agréable

J’intègre fin 1994 une petite société parisienne de 10 personnes qui justement fait des logiciels financiers. C’est l’une des premières sur ce créneau car jusque-là tout se faisait un peu en amateur sur Excel ou Access. Là on parle d’un énorme logiciel multi-utilisateurs, répliqué, base de données Oracle, temps réel, c’est l’éclate totale! Avec la société qui connaît un succès phénoménal, je passe rapidement de développeur à chef de projet, puis en 2000 je suis envoyé en Irlande pour mettre en place et gérer une des filiales de R&D. Le bureau dublinois croît jusqu’à une quarantaine de personnes à mon départ en 2006.

Ayant expérimenté cet esprit entrepreneurial pendant 12 ans, et la société ayant trop grossi, je ne retrouvais plus l’esprit de départ. Je me dis qu’il est enfin temps que je me mette à mon compte et je crée en Irlande un des tout premiers studios de jeux vidéo pour smartphones, ayant commencé ce hobby dans mon temps libre en 2003. Je concrétise cette passion du jeu vidéo et la transforme en mon activité principale. Cela m’a permis de participer à la naissance et la croissance de l’industrie du jeu sur mobile, une industrie à 100Mds par an. Et de voir au passage que créer une société, c’est bien différent de tout ce que l’on peut entendre sur le monde magique des startups et des licornes ! Tout n’est pas facile, loin de là, mais avoir fait une prépa vous y prépare plutôt bien (très peu de temps libre, travailler sur plein de choses à la fois, rythme effréné, …).

Fin des années 2000, nous rentrons en France, et je crée en 2011 ma deuxième société, française donc cette fois, qui développe un logiciel SaaS (Software as a Service) pour les studios de jeux vidéo. Découverte donc du monde du web, des problématiques de “scalability” (mise à l’échelle), de sécurité, de haute disponibilité, des containers et de leur orchestration, … L’avantage du monde de l’IT, c’est que ça va à toute vitesse, les technos s’améliorent, mutent et évoluent de façon déconcertante, et il faut savoir suivre tout ça et l’intégrer afin de rester à la page. Là aussi, passer par la prépa, ça aide un peu ! On a eu pas mal de jolis projets, qui nous ont notamment permis de collaborer sur des développements de jeux avec Julien Lepers et l’émission Téléfoot sur TF1. Puis en 2022, période post-COVID, l’industrie du jeu connaît quelques soubresauts et nous en faisons les frais, nous devons fermer la société qui employait une dizaine de personnes.

Mon dernier projet, début 2023, est encore une startup. Je me suis rendu compte avec ma dernière aventure que les data centers sont devenus des gouffres énergétiques et une réelle menace pour l’environnement, que la situation et ses perspectives ne sont plus tenables. Or, le matériel qui permet de faire baisser les coûts, la consommation énergétique et l’empreinte carbone de ces data centers, existe bel et bien! Il est encore très - trop - peu utilisé car il n’y a pas de logiciel pour l’utiliser convenablement. On s’attelle donc à construire l’infrastructure logicielle du data center de demain, ça s’appelle un hyperviseur. Pour simplifier, l’hyperviseur est au data center ce que le système d’exploitation est à l’ordinateur. L’un ne fonctionne pas sans l’autre. Rendez-vous dans quelques années…

Ce que je retire de mon passage à Camille Vernet

Il y a tellement de choses à dire ! Rétrospectivement, j'ai eu de la chance de passer par une prépa “de province”.

Je me demandais à l'époque si on n'était pas désavantagés face aux grosses prépas et aux parisiennes. Ce n'est absolument pas le cas. L'ambiance était vraiment top, et ne correspondait pas du tout à tout ce que j'avais pu entendre. Je m'y suis forgé de vraies amitiés et presque 35 ans après je revois encore pas mal de monde régulièrement.

Très bons souvenirs également des matchs de squash avec Laurent Chéno, le prof de maths, ainsi que de la semaine de vacances dans le Vercors avec lui et Alain Bèges, le prof de chimie.

Le niveau des profs était vraiment excellent, on s'en est aperçu très rapidement. Pas de désavantage non plus de ce côté là. Et on sentait qu'ils faisaient de leur mieux pour répondre aux besoins de chacun, qui sont tous différents.

Au final, la prépa c'est deux (ou trois) années certes un peu difficiles, mais c'est un véritable investissement qui porte très vite ses fruits. On s'en aperçoit dès qu'on intègre une école, et puis quand on rentre dans la vie active. Si vous avez la chance de pouvoir y rentrer, n'hésitez pas. Et Camille Vernet fut le lieu idéal pour vivre tout cela. Deux années compliquées certes, mais que je n'oublierai jamais, et sur lesquelles je porte un regard nostalgique. S'il fallait le refaire, je resignerais… et à Camille Vernet bien volontiers !

Publié le 29/03/2024
Modifié le 29/03/2024