Conférence économique et commerciale 2006/2007
Le développement du sous-développement
Grâce à un ancien étudiant de nos classes préparatoires qui a eu l’opportunité de travailler avec l’économiste franco-égyptien, Samir Amin, nous avons pu bénéficier de son regard atypique dans une pensée économique mainstream. Il s’inscrit en effet dans une approche néo marxiste du développement. Il place l’échange inégal au centre de ses analyses : pour lui, le sous-développement naît de la domination volontaire qu’exercent les pays développés capitalistes, ceux-ci organisant les échanges internationaux à leur profit.
Les produits manufacturés vendus par les pays riches aux pays dominés sont très chers alors que les produits ou matières premières exportés par les pays pauvres sont bon marché du fait du coût du travail très faible dans ces pays. Dès lors, les richesses des PED (la « Périphérie ») sont pillées par les pays développés (le « Centre ») et les écarts entre ces pays ne cessent de se creuser. C’est pourquoi, on assiste au « développement du sous-développement » (selon la formule d’André Gunder-Franck) et à la polarisation de l’économie mondiale autour des pays du « Centre », développés.
Pour s’affranchir de cette domination les pays pauvres doivent rompre avec une division internationale du travail qui leur est préjudiciable. Ils doivent adopter une stratégie de développement davantage autocentrée c’est-à-dire fondée sur la satisfaction de leur demande interne. Le surplus dégagé par la croissance doit être canalisé vers les investissements productifs. Le commerce extérieur, dont l’importance doit être limitée, est avant tout subordonné aux besoins de l’économie nationale et non à ceux des économies du « Centre ». La mise en œuvre de cette stratégie ne peut suivre un modèle unique : plusieurs voies sont possibles pour les pays de la « Périphérie » en fonction de leur histoire, de leurs structures socioéconomiques…
Samir Amin milite par ailleurs pour l’émergence d’une autre mondialisation, foncièrement anti libérale. Il ne faut donc pas s’étonner de le voir beaucoup s’investir dans le mouvement altermondialiste et promouvoir un « socialisme du 21e siècle » qui, selon lui, écartera les risques d’explosion inhérents au capitalisme mondialisé d’aujourd’hui.